Un nouveau pas vers la compréhension de la régénération chez les axolotls

     La compréhension du processus de régénération des membres chez les amphibiens, plus précisément les axolotls, a récemment progressé grâce aux travaux de l’Université Northeastern. En effet, ils ont découvert que l’acide rétinoïque (RA), un métabolite dérivé de la vitamine A, joue un rôle essentiel dans l’établissement de l’identité positionnelle au cours de la régénération (1).

        Tout d’abord, les membres amputés possèdent une mémoire des positions des cellules codée génétiquement, qui guide la régénération selon l’axe proximodistal, soit de la base à l’extrémité du membre. Cette identité positionnelle est donnée par des gènes structuraux guidant les blastèmes, soit des amas de cellules dédifférenciées issues de l’amputation, vers l’axe à régénérer. L’acide rétinoïque, spécifiquement en grandes quantités, spécifie l’identité de segments proximaux via l’activation de gènes tels que Meis1 et Shox, tout en réprimant des gènes distaux comme Hoxa13.

     Le gène Cyp26b1 est essentiel grâce à son rôle de régulateur étant donné qu’il permet la dégradation de l’acide rétinoïque. Il est grandement exprimé dans les blastèmes distaux ce qui limite le signal transmis par le RA, empêchant l’expression de gènes proximaux. Au contraire, l’inhibition du gène Cyp26b1 augmente les niveaux d’acide rétinoïque, provoquant la reprogrammation moléculaire de l’identité positionnelle des blastèmes distaux en blastèmes proximaux, entraînant la croissance de structures plus proches du corps de l’animal.

        Le second facteur important identifié dans le processus est le gène Shox, sensible au RA et exprimé principalement dans les membres proximaux amputés. L’ablation de ce gène entraîne des membres raccourcis dont les segments proximaux ne peuvent pas entamer la régénération osseuse à partir du cartilage. Ainsi le gène Shox est essentiel seulement pour la régénération osseuse mais non pas pour la régénération globale chez l’axolotl.

       Cette découverte permet ainsi de mieux comprendre la régénération chez ces amphibiens et mène à des applications en médecine sur l’humain via la mise au point de thérapies géniques (2).

      La thérapie génique consiste fondamentalement à utiliser des vecteurs pour délivrer des acides nucléiques (ADN ou ARN) aux tissus ciblés en utilisant des méthodes directes ou à médiation cellulaire transduite. Néanmoins ce type de thérapie n’a pas encore été démontré comme étant déterminant dans la régénération des tissus chez les mammifères ou même sûre.

        La restauration et fonction du membre après amputation représente un challenge car il faut induire la dédifférenciation et la croissance, la restructuration des tissus, ainsi qu’arrêter la prolifération cellulaire et migration. Certaines molécules présentes chez l’axolotl ont été déterminées comme facteur de croissance osseuse chez l’humain, dont certaines sont testées en essais cliniques (2). De plus, il est nécessaire d’assurer la viabilité du blastème chez l’hôte en adressant toute complication liée à l’intégration (3).

       En conclusion, cette étude montre que la dégradation globale de l’acide rétinoïque, contrôlée par Cyp26b1, est essentielle pour établir la signalisation adéquate, définissant l’identité positionnelle le long de l’axe proximodistal. L’expression de gènes comme Meis1 et Shox est strictement régulée afin de permettre une régénération précise des structures amputées. Ces découvertes ouvrent la voie pour l’élaboration de nouvelles stratégies de régénération, notamment à travers des blastèmes modifiés artificiellement, bien que leur validation clinique reste à vérifier.

Références :

1.  Duerr, T. J., Miller, M., Kumar, S., Bakr, D., Griffiths, J. R., Gautham, A. K., Douglas, D., Voss, S. R., & Monaghan, J. R. (2024). Retinoic acid breakdown is required for proximodistal positional identity during amphibian limb regeneration. bioRxiv : the preprint server for biology, 2024.08.07.607055. https://doi.org/10.1101/2024.08.07.607055 

2. Huang, L., Ho, C., Ye, X., Gao, Y., Guo, W., Chen, J., Sun, J., Wen, D., Liu, Y., Liu, Y., Zhang, Y., & Li, Q. (2024). Mechanisms and translational applications of regeneration in limbs: From renewable animals to humans. Annals of anatomy = Anatomischer Anzeiger: official organ of the Anatomische Gesellschaft, 255, 152288. https://doi.org/10.1016/j.aanat.2024.152288 

3. Alibardi, L., 2018. Review: Limb regeneration in humans: Dream or reality? Ann. Anat. 217, 1–6. https://doi.org/10.1016/j.aanat.2017.12.008 

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